jeudi 7 juillet 2016

A propos du terrorisme russe



Ce que dans son "Déjà vu"* du 1 juillet Alexandre Podrabinek dit de l'actualité du terrorisme russe : Piotr Pavlensky et les Primorski Partizany, etc., m'a fait penser aux positions réaffirmées par Mykhaïlo Drahomanov en 1881, à l'occasion de l'assassinat d'Alexandre II.






      La différence des idées sur les moyens d’action n’est pas le seul trait qui nous distingue des révolutionnaires russes. Dans notre réponse au « Golos », nous l’avons prié de nous exclure non seulement des rangs du parti « socialiste-révolutionnaire russe », mais de tous les partis « russes ». Bien que né de parents « sujets de l’empereur russe », nous ne sommes Russe ni par notre nationalité, ni par le sol de notre action. Nous ne sommes pas Moscovite, mais Oukraïnien ; et puisque notre nationalité existe non seulement en Russie (où elle souffre du gouvernement et aussi, en grande partie, de l’intolérance de l’opinion publique par trop centraliste), mais aussi en Autriche-Hongrie, nous, dans notre travail pour notre peuple, nous nous appuyons autant sur le sol qui fait partie de la Russie que sur celui qui est en dehors de l’empire des tzars. Nous pouvons avoir des points communs avec certains partis « russe » en tant que notre travail pour notre pays l’exige, mais nous ne pouvons entrer complétement dans aucun parti « russe ». Du reste, ceux qui lisent les publications des révolutionnaires russes savent que nos opinions et même notre personnalité y sont très souvent attaquées, et quelquefois avec la même ardeur et les mêmes arguments que dans les organes des centralistes moscovites de l’école conservatrice. Le langage étroitement moscovites des publications révolutionnaires russes, leur peu d’attention pour les nations de l’empire autres que la nation russe (moscovite), enfin l’esprit de plus en plus jacobin et centraliste qui se manifeste dans les tendances des révolutionnaires russes (et qui est si naturel chez les fils d’un état dont l’histoire est si analogue à celle de l’ancienne France, et qui avait encore subi l’influence directe du droit byzantin et du despotisme tartare), tout cela nous oblige à opposer aux idées des révolutionnaires russes notre critique, qui est celle d’un socialiste-fédéraliste oukraïnien. Nous leur rappelons, de temps en temps, qu’il y a en Russie, en présence des quarante millions de Russes, d’autres peuples comptant au moins autant de membres, dont les intérêts ne peuvent être satisfaits, ni par une convention nationale russe à la française, ni par le Volkstaat centralisé que rêvaient les socialistes-démocrates allemands pour leur pays, plus homogène et dix fois plus petit que la Russie d’Europe.


...

      C’est ici le point sur lequel doivent réfléchir tous les hommes politiques de l’Europe, et c’est aussi la raison pour l’intervention de l’Europe dans la crise de la Russie. Nous avons démontré que la réaction, et surtout les mesures contre le socialisme, ne peuvent être d’aucune utilité pour l’apaisement de cette crise. Le retour à l’ancien régime est chose impossible. Il ne reste donc au monde civilisé qu’un moyen d’action dans les affaires russes, qui sera autant efficace pour sa propre défense que salutaire à la Russie : c’est de favoriser autant que possible l’introduction des institutions libérales dans ce pays.

... nous sommes d’avis que le gouvernement absolutiste russe soit complétement isolé dans sa lutte avec ses sujets, quelle que soit la forme revêtue par cette lutte. Nous partageons bien l’opinion que l’assassinat politique est toujours un assassinat, et que la vie d’un souverain doit être sacrée autant que celle d’un simple particulier : aussi c’est pour cela que nous ne prêchons pas l’assassinat politique. Mais il y a une différence entre prêcher et comprendre, et , - par conséquent, pardonner. Donc, même les gouvernements du monde civilisé doivent comprendre les causes qui poussent les sujets du tzar aux attentats politique, et, partant, refuser toutes les demandes d’extradition de la part du gouvernement russe. Oui, on a raison quand on dit que l’assassinat politique est toujours un assassinat ; mais on a raison aussi quand on dit que le tribunal doit représenter une justice impartiale : or, dans les affaires politiques, le gouvernement russe est lui-même le juge et le plaignant.

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       Mais si l’action des gouvernements du monde civilisé dans la crise de Russie doit se limiter à la non-extradition des criminels politiques russes, quel que soit le crime qu’ils aient commis contre leur gouvernement, le rôle de l’opinion publique, de la presse européenne doit être plus actif. Le premier devoir de la presse c’est d’éclairer le public en lui donnant le résultat des études de l’état des choses dans tous les pays. Si la presse européenne se donne donc la peine d’étudier l’état de la Russie, le caractère de  son gouvernement, les tendances de ses classes éclairées et les besoins de ses populations, etc., elle verra : 

1° Que pour la bonne moitié de ses sujets, pour les Finlandais, les Allemands, les Lettes, les Lithuaniens, les Polonais, les Blancs-Russiens, les Oukraïniens, les Roumains de Bessarabie, les peuples du Caucase, etc., le gouvernement du tzar n’est pas même un gouvernement national, qu’il lèse brutalement les droits et les sentiments les plus naturels de ces nationalités, et entrave leur développement.

2° Que le régime actuel en Russie, est, en général, tout à fait différent de celui de l’Europe moderne, et n’est que le mélange bizarre des institutions du moyen-âge avec celles de la période de l’état bureaucratique des XVIIe et XVIIIe siècles, de ce que les Allemands appellent Polizeistaat.

3° ...









Bonus
En quatrième de couverture, la bibliographie recommandée sur l'Oukraïne :


"Il paraît que les journalistes qui renseignent le gros public de l'Europe sur la Russie, sont les derniers à lire ces ouvrages."

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* émission de radio Svoboda, USA (en russe)

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