jeudi 23 août 2018

Sentsov, 102ème jour de la grève de la faim

[The time is running out]
102 дні як увімкнув зворотній відлік своєї пекельної машини "терорист" Олег Сенцов.

"Ми просто йшли, у нас нема зерна неправди за собою."

Notez que le tribun du Figaro ignore totalement le point de vue de Oleg Sentsov sur la question. Et tout particulièrement la Lettre à tous ceux que ça peut intéresser, août 2016 et la Déclaration d'entrée en grève de la faim, 14 mai 2018. 102 jours de la grève de la faim aujourd'hui.




FIGAROVOX/TRIBUNE - Le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov poursuit sa grève de la faim pour protester contre son incarcération et contre la politique de Vladimir Poutine. De nombreux appels d'intellectuels occidentaux en faveur du réalisateur se font entendre. Pour Philippe Bilger, aussi louable que soit la cause de Sentsov pour ses partisans, il faut le convaincre, dans son propre intérêt, de se montrer plus conciliant.
Une opinion maréchaliste
Philippe Bilger : «Il faut sauver Oleg Sentsov de lui-même», Figaro, 22.08.18

Je n'ai jamais aimé les pétitionnaires compulsifs dont l'industrie est de déplorer, de dénoncer et de condamner. 
Pourtant le tragique affrontement entre Oleg Sentsov et Vladimir Poutine - malgré les nombreux soutiens notamment de ses collègues cinéastes, dont bénéficie Sentsov - sort des combats habituels et renvoie chacun à une interrogation intime et pas seulement politique.
Le fait qu'Emmanuel Carrère, qui n'est pas un frénétique de la pétition, nous ait alertés en même temps que le président Macron sur le sort de Sentsov n'a pas été pour rien dans mon intérêt.
Je constate qu'au fil du temps on finit par oublier le fond même de la querelle, même si reste dans notre esprit que le cinéaste pourfend l'incarcération des prisonniers politiques ukrainiens en Russie et qu'il récuse la nationalité russe qu'on lui a imposée.
Le sentiment domine, de plus en plus tristement fatal, que s'opposent deux rigidités dont la nature est évidemment différente.
Oleg Sentsov en est à plus de cent jours de grève de la faim et son état de faiblesse générale, qui le conduit à économiser le peu de forces qui lui restent, plonge ses proches dans une angoisse que lui-même ne cherche pas à apaiser puisqu'il n'entend pas abandonner sa grève de la faim et qu'il refuse de demander sa grâce à Poutine, condition que celui-ci pose pour une éventuelle mansuétude.
Il y a dans ce comportement un courage, une résistance et une inflexibilité qu'on peut admirer mais son extrémisme va conduire à une issue mortelle si, dans cet antagonisme, la rigidité de Sentsov n'accepte pas de plier face à celle, redoutable, de Poutine.
Car ce dernier est dans sa posture de prédilection: montrer qu'il est fort et n'a peur de rien, surtout pas de la mort d'un homme dont il ne s'estimera pas responsable. Campé sur son arrogance, sûr de son pouvoir et muré, il n'est rien moins qu'influencé par les multiples soutiens qui viennent en pure perte au secours de Sentsov. Je pense même qu'ils sont contre-productifs, car Poutine semble jouir profondément d'une attitude qui, le plaçant seul contre beaucoup, lui permet de ne pas tenir compte des principes de l'humanisme classique.
Deux rigidités qu'il serait scandaleux de ne pas chercher à assouplir.
Il faut convaincre Sentsov de sortir de son intégrisme, aussi bonne que soit sa cause aux yeux de ses partisans, en lui conseillant d'abandonner sa stratégie suicidaire qui en définitive ne fera de mal qu'à lui-même.
Serait-il honteux de lui demander au moins d'arrêter sa grève de la faim?
Est-il impossible de cesser de mettre subtilement ou ostensiblement Poutine au défi d'aller au bout de son intransigeance et de sa fermeté? Avec cette méthode on sait bien que le pire adviendra. Ne pourrait-on pas tenter de débarrasser cette joute gravissime de son humus international qui loin de représenter une solution est de plus en plus un handicap?
Le président Macron a évoqué avec Sentsov la situation de ce dernier et je ne doute pas qu'il a su le faire avec habileté et finesse. Il s'agit de persuader Poutine qu'une forme d'humanité serait non seulement une réponse du cœur mais un exercice de l'intelligence.
Rien de pire en tout cas que de pousser ces deux rigidités à bout, au bout.
Il faut sauver Oleg Sentsov. Mais aussi de lui-même.
Et il faut permettre à Vladimir Poutine de se sauver de ce qu'il a de pire en invoquant uniquement son intérêt politique.

http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2018/08/22/31002-20180822ARTFIG00119-philippe-bilger-il-faut-sauver-oleg-sentsov-de-lui-meme.php






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